peinture Pierre Aleschinski
53.
Sans s’inquiéter, elle laisse passer le jour, puis
encore un jour, puis encore un jour, puis encore un jour, et les nuits qui vont
avec, elle laisse passer les nuits & les jours, elle ne sait même pas où je
suis, elle ne s’en inquiète pas, mais où a-t-il disparu, elle se demande pas
ça, où est-il allé dans la nuit, ou dans le jour, elle se demande pas ça, elle
laisse passer les jours & les nuits sans s’inquiéter un seul instant, est-ce
que j’eksiste encore, demande Naroki avec son accent de la banlieue de Nagoya,
est-ce que j’eksiste encore ou suis-je déjà enseveli, il pose d’eksistentielles
questions, stupides vaniteuses et vaines questions, risible souci de soi, elle
ne s’inquiète pas de mon eksistence, je suis déjà enseveli, et elle ne s’en est
pas rendu compte, pendant que Melanie de Biasio chante « No Deal »,
chant immobile, presque sans voix, batterie anxieuse, synthétiseur-orgue
déjanté, syncopes & dissonances, juste pour exaspérer les silences,
subvertir la mutité, scander les instants, égrener un merdeux chapelet d’inaudibles
plaintes, sans s’inquiéter de moi, elle laisse passer les nuits & les
jours, on dira qu’elle a un mauvais rhume, et Naroki, au gré des instants et
sous la grâce inouïe de l’Astre d’Apollon, se sent plus pimpant que jamais.
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