mardi 6 mars 2018

CAHIER HEMA NOIR - chapitre 48

peinture Vilhelm  Hammershøi, 1900



48.
Parfois certains jours sans que je n’aie rien convoqué ou même suscité, tel ou tel endroit de ma maison, à l’intérieur, selon la perspective ou l’angle de vue, ou même des circonstances sonores, la Passacaglia per violino solo de Heinrich Ignaz Franz von Biber ou la Ciaccona op. 2, No 12 d’Arcangelo Corelli, alors que viens d’apercevoir sur la vitre sale & embuée de la lucarne du grenier une chrysope, pour la première fois depuis des années une chrysope dans ma maison, sans que je n’aie rien convoqué ni suscité, tel ou tel endroit à l’intérieur de ma maison prend des airs de Hammershøi, abstractions géométriques horizontales & verticales dans toutes les nuances de l’ocre & du gris, avec quelques diagonales nonchalamment violentes, suggestions de rais vieil or et halos tamisés verdâtres, tout cela pour exalter l’habitacle où j’ose à peine bouger ou respirer, comme si je n’étais pas là, n’y avais jamais été et ne le serais jamais plus, présence aléatoire & incongrue comme cette chrysope aux yeux d’or, la femme que j’ai le plus aimée avait des yeux d’or, puis ses yeux d’or, un jour, m’ont jeté un sort, et là où j’habite c’est désormais une évanescence fantasmée par un peintre danois en 1900. 



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