photographisme © L. Sch. |
Dans
la ronde arène du Grand Cirque, ça sent mauvais, les éléphants ont encore pissé,
le sable jaune et la sciure absorbent le liquide mais évaporent la puanteur, le
tromboniste a peint en bleu son trombone et l’a laissé sur l’estrade de l’orchestre,
à côté de son trépied, peu après minuit les derniers spots s’éteignent, une
pluie d’automne tambourine bruyamment sur la toile de la tente, depuis
longtemps la trapéziste n’en peut plus de son trapéziste, couple en discorde
sur la corde entre ciel & terre, et ce soir la fausse note du trombone a
failli leur coûter la vie, ils se sont rudement retrouvés côte à côte dans la
pisse d’éléphant, cela leur a terni les paillettes, ça tombe bien, pense la
trapéziste, un peu sonnée, ça tombe bien, il est aux urgences, j’espère qu’il
va pas s’en tirer, pétage de vertèbres cervicales, ça craint, et moi j’ai la
haine, la haine, elle erre, claudiquant un peu, parmi les réverbères de fortune
dans l’enclos du cirque endormi, elle est toujours en costume de spectacle, passablement
dénudée, elle a nettoyé les paillettes, le vieux léopard feule dans sa cage,
dans l’obscurité elle essaye d’éviter les flaques boueuses, puis se dirige vers
la grande tente, elle a mal au genou, très mal, mais son cœur va bien, très
bien, et peu après, au milieu de l’arène, dans la sciure humide, le tromboniste
la prend et la pénètre passionnément.
dans: "Kafka à la Fenice", improbables péripéties
chapitre 43 - inédit
.
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