photographisme © L. Sch. |
La
petite perle avait été conservée et exposée au musée municipal de Helsingør
pendant une bonne trentaine d’années, dans une vitrine spéciale au milieu de la
salle dite des draperies rouges, c’était l’objet le plus fameux de cet ancien
musée de province, calèches et diligences le dimanche amenaient les habitants
de Copenhague, qui par familles entières faisaient le pèlerinage de la petite
perle, puis un jour de novembre 1876 la petite perle disparut, c’était quelques
mois après la mort d’Andersen, la fenêtre côté parc avait été cassée, ainsi que
la vitrine, ne restait que le coussinet en satin vermeil et l’écrin ovale
parsemé de soyeux crins blonds, l’auteur du vol n’a jamais été identifié, sa
motivation était incompréhensible, puisque la précieuse petite perle n’avait
aucune valeur, tout le monde savait que ce n’était qu’un petit pois desséché, pâlot
& ratatiné, la moite verdeur s’était depuis longtemps estompée, Thorbjørn,
le voleur, garda bien son secret, il vécut presque centenaire, les dix dernières
années de sa vie, il les passa grabataire, esseulé et muet dans sa cabane
pourrie à l’ombre de sapins géants, sur l’étroite étagère, ses livres empoussiérés
étaient à moitié dévorés par la vermine, les souris & les rats, presqu’aveugle
il ne lisait plus, mais interminablement, à longueur de journée & de nuit, il
se racontait des histoires, celle qu’il préférait était celle de la petite
perle qui fait jouir la princesse.
dans "Kafka à la Fenice", improbables péripéties
chaptire 44 - inédit
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