pendant l'incendie dans la montagne - photo L. Sch. |
Ce que j’ai fait, c’est de l’hybris, échapper ainsi à l’hiver,
c’est un acte contre nature, aller ainsi à l’autre bout de la terre, c’est une
gesticulation métaphysique, jouer avec la vie & la mort, chambouler le
cours des choses, subvertir le rythme de la vie, mais j’ai pensé que je pouvais
le faire, j’ai pensé que vu mon âge passablement avancé et l’évidente défaveur
de la salope de statistique à mon égard, je pouvais de cette manière excessive provoquer
le destin, j’ai candidement confié mon âme chétive au bleu du ciel et à la lumière
du soleil, j’ai donquichotesquement affronté le moulinage de la Mort, l’opacité
de la Nuit, j’ai respiré avec une insolence inouïe, vécu chaque instant dans le
déchirement entre refus et acceptation, vivre à fond sur fond de trépas,
pleurer sans cesse l’amour perdu et sans cesse jubiler de l’amour vécu, m’abreuver
goulument de l’infinie beauté du monde, et m’abîmer dans le vertige de l’absurdité
universelle, et griffonner à longueur de journée mes solennelles petites rédacs
prétentieuses et inutiles.
Le murmure du monde, vol. VII
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire