Brin, dessin L. Sch.
59.
Je
sortis sur cette sorte de balcon tout en béton, immeuble peut-être encore en construction,
donnant sur la nature, parc ou forêt, il n’y avait pas de ville, je n’étais pas
chez moi, au quatrième jour du quatrième mois, je sortis sur ce balcon où je n’avais
jamais été, avec soudain la certitude, la conviction, je venais de l’apprendre,
je venais d’en être conscient, je venais de le réaliser, que j’avais encore
trois jours, chiffre explicite & exprimé, solitude soudain sur ce balcon,
solitude dans la solitude, aucune présence humaine fortuite, aléatoire ou
familiale, il n’y avait personne, et je ne pensais pas à mes enfants, ni à mes
parents, ni aux deux femmes que j’ai aimées, juste un immense tranquille
désarroi, j’ai encore trois jours, dans trois jours je vais mourir, évidence,
insaisissable imparable verdict, sans aucune raison physique, ni maladie ni
douleur, — — — et en moi, pendant ces moments d’aphone engourdissement éclot comme
une résolution : ce seront trois jours où tu seras comme les jours
précédents, où tu feras comme les jours précédents, goûtant les infiniment
précieux petits menus bonheurs du jour le jour pendant les derniers jours, et tandis
que je note ça, une mélancolique monotone pluie d’avril tapote sur la lucarne
de mon grenier.
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