peinture Pierre Aleschinski
110.
A la voir, tout en haut, ma hyper intellectuelle chérie, tout en haut de ce
podium, faire son exposé, à la voir, à l’entendre, je soupire, à part moi, pour
ne pas déranger l’assistance, il y a tant de monde, plein de gens que je ne
connais pas, et qui ne prennent pas note de moi, ne me connaissant pas non
plus, ils sont venus si nombreux au pied de ce podium, et ça m’énerve, tous ces
gens au pied de ce podium, accourus pour assister acquiescer applaudir à ce qu’expose
ma hyper intellectuelle chérie, personne évidemment ne peut s’en douter qu’elle
est ma chérie, et je pense même qu’elle-même ne s’en doute pas, comment
serait-elle sensible à mes soupirs, pendant qu’en haut du podium elle s’expose
dans ses exposés, je n’ai pas le cœur à écouter, j’entends mais n’écoute pas,
me laisse juste captiver par sa voix, le timbre de cette voix qui m’émeut jusqu’au
fond de l’âme, et suscite mes soupirs, et je suis inexistant invisible parmi la
foule si attentive, et quand autour de moi, à certains moments de l’exposé, on applaudit,
je n’applaudis pas, pour ne pas attirer l’attention, et elle, là-haut, ne s’en
rendrait pas compte que j’applaudis si j’applaudissais, je ne suis pas venu
pour applaudir, mais pour soupirer, et mon pauvre cœur soupire inaudiblement,
arrête, ma chérie, redescends de là et viens m’offrir la douce douceur sucrée
salée de ton adorable foufoune.
PROSERIES
Le Murmure du monde, vol. VIII
chapitre 110
inédit
.
|
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire